Power / CO2 – V.F.

Février 2020

suite à une discussion familiale autour du réchauffement global, tout naturellement est venu sur la table l’impact carbone. Chacun défendait en toute bonne foi le fait que les énergies renouvelables sont une évidence qu’il est de notre devoir immédiat de mettre en œuvre. Les évidences sont souvent sources d’erreurs fondamentales car elles sont le résultat d’opinions qui reflètent une totale méconnaissance du sujet. Sans chercher à apporter une réponse définitive à un sujet trop complexe pour n’être abordé que dans le cadre d’une discussion ou d’un article, nous allons tenter d’apporter un éclairage sur les sources d’énergie et tenter de rester factuels.

Production d’électricité dans le monde

Le graphique ci-dessous montre la répartition des sources d’énergie par pays. Afin de rendre le graphique lisible, cette répartition est exprimée en pourcentage, les barres sont de hauteur égales. Il est évident que la Chine consomme plus d’électricité que le Portugal. Ce graphique montre les choix politiques et historiques de la production d’électricité.
Le premier point qu’il convient de souligner est que l’Amérique, toute puissante qu’elle est, produit deux fois moins d’électricité que la Chine. Le second point est que le Canada qui est dix fois moins peuplé que les USA produit par habitant quasiment deux fois plus d’électricité pour un impact carbone dix fois inférieur.Pour info la catégorie RE signifie Renewable Energy couvre l’hydro-électrique, l’éolien et le solaire.

Il est tentant de simplifier la raison des différences observées en réduisant les causes à un ou deux facteurs. Si dans certains cas c’est parfaitement possible, vouloir simplifier à outrance ne permet pas d’apporter la moindre réponse. Toutefois l’étude des conditions initiales d’un rapport de production permet de quantifier l’importance des facteurs. Les différents facteurs sont la disponibilité d’une ressource, l’état de développement d’un pays, les choix politiques de long terme. Lorsque ces trois facteurs perdent leur prépondérance, lorsque l’opinion publique, l’éducation de la population, alors d’autres types de production d’énergie s’imposent aux dirigeants politiques. Dans ce cas les choix dans les modes de production d’électricité se complexifient, les raisons des choix initiaux perdent leur évidence.

L’approche développement

Dans cette approche, le coût et la simplicité de mise en œuvre sont les éléments prépondérants. Typiquement la Chine et l’Inde, l’accès, illustrent cette problématique. En Chine le charbon est disponible en quantité inépuisables, les centrales électriques au charbon sont simples à construire et à mettre en œuvre, elles produisent une électricité qui ne dépend pas des aléas politiques tels que les importations de charbon. Malheureusement la combustion du charbon émet non seulement du dioxyde de carbone (le gaz carbonique) mais aussi des oxydes de souffre et d’azote qui, combinées à l’eau de la pluie, deviennent des acides. Dans les années soixante les forêts allemandes de conifères en ont été la victime. Ces pluies acides sont à la base de la naissance des mouvements écologiques radicaux en Europe. La combustion du charbon produit aussi des particules de carbone imbrûlé à l’origine du SMOG, brouillard toxique que Los Angeles et Londres ont connu dans la première moité du XXième siècle.

Dans la première phase du développement de la Chine les inconvénients liés à ce choix naturel, le charbon, étaient largement compensés par les progrès induits. Aujourd’hui l’opinion publique, bien que largement muselée par la pouvoir politique, commence à se faire entendre et exige une réduction des nuisances induites. Afin de répondre aux demandes de la population et soigner son image à l’international, la Chine a débuté une transition écologique.

Le nucléaire

La France est un état centralisé. Dès la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, la production d’électricité a été nationalisée et placée dans une société d’état, cette société est EDF. Pendant la première moitié du XXième siècle, le charbon fut une source significative de conflits entre la France et l’Allemagne. La France dispose sur son territoire de quantité significatives de minerai d’Uranium et, à travers ses anciennes colonies d’Afrique, elle dispose aussi d’un accès privilégié à ce minerai. Au nom de l’indépendance nationale, dès la naissance de la IVième république, la France a développé une filière nucléaire civile et militaire. Si la production d’électricité nucléaire n’émet pas de dioxyde de carbone, celle-ci impose de lourdes contraintes à la fois sur le plan de la sécurité du fonctionnement ainsi que sur la sécurité autour de l’ensemble de l’activité. Les carburants entrants et sortants font l’objet d’une attention sécuritaire toute particulière pour éviter des fuites de matériaux radioactifs vers des groupes aux intentions peu conformes à notre mode de vie.

Parmi les risques techniques de fonctionnement, on se souviendra de Three Miles Island, Tchernobyl et plus récemment Fukushima. Il convient aussi de ne pas oublier l’ensemble de la problématique du retraitement des déchets issus des centrales nucléaires ni les risques du terrorisme nucléaire liés à des vols de matière radioactive. Heureusement, pour le moment, le chantage terroriste à l’attaque nucléaire reste une hypothèse mais cela pourrait ne pas durer.

Si le nucléaire est une possible réponse au besoin d’énergie, les contraintes imposées par les aspects liés à la sécurité limitent son développement harmonieux à des structures d’état qui acceptent à la fois une centralisation forte des moyens sécuritaires mais aussi des contre-pouvoirs chargés de maintenir les risques d’une telle chaîne de production dans des limites acceptables. Un véritable défi démocratique constant que des pays tels que la France et la Suède se sont imposés.

L’efficacité de court terme

A l’opposé de la Chine et de la France, les USA se sont dotés de moyens de production d’électricité privés. Aux USA le gaz et le charbon sont d’un accès facile, plus de 60% de l’énergie produite provient de ces sources. Les mines de charbon, l’extraction du gaz relèvent du domaine privé. A la différence du nucléaire qui exige une vision et un engagement de long terme, en particulier de l’état, la production d’électricité fossile, par sa simplicité de mise en œuvre permet une gestion de court terme. Aujourd’hui l’administration US ne propose aucune vision sur le long terme, elle est focalisée sur l’efficacité financière de l’extraction (charbon, gaz) et des moyens de production. La sortie de l’accord de Paris démontre l’absence de volonté des US d’intégrer une démarche globale pourtant nécessaire.

Il est pour le moins cocasse de constater que deux options politiques opposées, le capitalisme dit libéral des US et le règne incontesté du parti communiste chinois ont tous deux choisi des modes de production d’énergie semblables.

Les énergies renouvelables

Sous le couvert d’énergies renouvelables sont intégrées de nombreuses formes, barrages hydro-électriques, éoliennes, solaire, biomasse… Il est intéressant de segmenter les sources. C’est l’objet du graphique ci-dessous.En haut de chaque barre, le nombre indique le pourcentage de l’énergie renouvelable produite dans l’ensemble de la production d’un pays donné.

En première remarque, les quatre pays qui produisent plus de 50% de leur énergie en renouvelable sont des démocraties dans lesquelles l’opinion publique et le sens civique de l’électorat est fort. A ce titre le Portugal qui vécut jusqu’à une époque récente sous des régimes autocratiques, royauté absolue puis dictature militaire, montre qu’une volonté populaire forte (la Révolution des Œillets) soutenue par une intégration trans-nationale dans l’UE offre des perspectives démocratiques heureuses.

En queue du peloton, la France et les US sont en fort mauvaise compagnie en ce qui concerne la réception de l’expression des citoyens. La Chine et sa dictature d’un parti communiste dévoyé, l’Inde et son populisme nationaliste , le Japon particulièrement célèbre pour son ouverture à l’altérité (mais non, je blague, c’est très exactement le contraire) ferment la marche des pays vertueux sur le sujet des énergies renouvelables.

En matière d’énergie renouvelable certains pays sont dotés par les hasards de l’histoire de ressources inépuisables. Le Canada, à travers la société Hydro-Québec, suit un chemin vertueux qu’il est impossible de dupliquer. Lire ce graphique est un exercice intellectuel qui justifie à lui seul la purge que nous avons tous subi lors des cours de géographie au lycée. Qui peut expliquer que deux pays scandinaves à priori semblables, la Suède et le Danemark, montrent des profils de production si différents. Si d’aventure la mémoire vous revient, elle vous permettra de comprendre les relations qui existent entre les différents formes de production d’énergie renouvelables.

Enfin, si un élément vous semble mal décrit, faux, contre intuitif, irrationnel, si au contraire cet article aura éclairé votre lanterne, n’hésitez pas à me faire part de vos remarques, caustiques, critiques ou constructives en cliquant sur le lien suivant. Partagez vous réflexions.

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